(Jur) Mandat d’arrêt européen : le parquet est une autorité judiciaire d’émission indépendante
La CJUE complète sa jurisprudence sur la décision-cadre 2002/584, relative au mandat d’arrêt européen, en apportant des indications sur l’exigence d’indépendance de l’« autorité judiciaire d’émission » d’un mandat d’arrêt européen et sur l’exigence de protection juridictionnelle effective, qui doit être assurée aux personnes faisant l’objet d’un tel mandat d’arrêt.S’agissant des magistrats du parquet français, selon la Cour, ils disposent du pouvoir d’apprécier de manière indépendante, notamment par rapport au pouvoir exécutif, la nécessité de l’émission d’un mandat d’arrêt européen et son caractère proportionné et ils exercent ce pouvoir objectivement, en prenant en compte tous les éléments à charge et à décharge. Leur indépendance n’est pas remise en cause par le fait qu’ils sont chargés de l’action publique, ni par le fait que le ministre de la Justice peut leur adresser des instructions générales de politique pénale ni par le fait qu’ils sont placés sous la direction et le contrôle de leurs supérieurs hiérarchiques, eux-mêmes membres du parquet, et donc tenus de se conformer aux instructions de ces derniers.S’agissant de l’exigence posée dans sa jurisprudence récente, selon laquelle la décision d’émettre un mandat d’arrêt européen doit, lorsqu’elle est prise par une autorité qui n’est pas une juridiction, pouvoir être soumise, dans l’État membre d’émission, à un recours juridictionnel respectant les exigences d’une protection juridictionnelle effective, la Cour souligne que l’existence d’un tel recours juridictionnel ne constitue pas une condition pour que l’autorité soit qualifiée d’autorité judiciaire d’émission. Elle indique de plus qu’il revient aux États membres de veiller à ce que leurs ordres juridiques garantissent de manière effective le niveau de protection juridictionnelle requis au moyen de règles procédurales qu’ils mettent en œuvre et qui peuvent différer d’un système à l’autre. Or, l’instauration d’un droit de recours distinct contre la décision d’émettre un mandat d’arrêt européen ne constitue qu’une possibilité. Lorsque les conditions de délivrance du mandat, et notamment son caractère proportionné, font l’objet d’un contrôle juridictionnel dans l’État membre d’émission, cette exigence est remplie.En l’occurrence, les systèmes français et suédois répondent à ces exigences, puisque les règles procédurales nationales permettent de constater que le caractère proportionné de la décision du parquet d’émettre un mandat d’arrêt européen peut faire l’objet d’un contrôle juridictionnel préalable, voire quasi concomitant à l’adoption de cette décision, mais également d’un contrôle juridictionnel ultérieur. En particulier, une telle appréciation est notamment effectuée, de manière anticipée, par la juridiction qui adopte la décision nationale susceptible de fonder, par la suite, le mandat d’arrêt européen.La Cour souligne que, lorsque le mandat d’arrêt européen tend à l’exécution d’une peine, le contrôle juridictionnel est réalisé par le jugement exécutoire sur lequel est fondé ce mandat d’arrêt. En effet, l’autorité judiciaire d’exécution peut présumer que la décision d’émettre un tel mandat d’arrêt est issue d’une procédure judiciaire dans laquelle la personne recherchée a bénéficié de garanties quant à la protection de ses droits fondamentaux. Par ailleurs, la proportionnalité de ce mandat d’arrêt résulte également de la condamnation prononcée.